Lamentations 2

Dieu, un ennemi

1Comment ![#2.1 voir v. 1 ; ce deuxième poème est conçu sur le même modèle que le premier, à l'exception d'une interversion des lettres hébraïques ( pé-‘aïn au lieu de ‘aïn-pé ) correspondant ici aux v. 16 et 17 ; le même ordre se retrouvera dans les deux poèmes suivants. – litt. la fille de Sion, de même aux v. 4,8,10,13,18 ; 1.6. – (Es 60.7 ; 64.10) et (litt. marchepied de ses pieds ; cf. Es 60.13 ; 66.1 ; Ez 43.5-7 ; Ps 99.5 ; 132.7 ; 1Ch 28.2) désignent sans doute ici Jérusalem et son temple.]

Le Seigneur, dans sa colère,

a couvert de nuages Sion la belle !

Il a précipité du ciel sur la terre

la splendeur d'Israël !

Il ne s'est pas souvenu de son marchepied

au jour de sa colère !

2Le Seigneur a englouti tous les domaines de Jacob,[#2.2 cf. Dt 28.52. – litt. la fille de Juda, v. 5 ; 1.15.]

il n'a rien épargné ;

il a, dans sa fureur, rasé

les forteresses de Juda la belle,

il les a fait tomber à terre ;

il a profané le royaume et ses princes.

3Il a, dans sa colère ardente, abattu complètement[#2.3 l'image évoque habituellement la puissance ou la fierté ; cf. v. 17 ; Jr 48.25 ; Ps 75.11. – la même formule est rendue par faire reculer en 1.13. – sa protection ; cf. Ps 118.15s ; 121.5-7. – litt. un feu de flamme ; cf. Es 45 ; Os 7.6.]

la corne d'Israël ;

il a retiré sa main droite en arrière

devant l'ennemi ;

il a allumé en Jacob comme un feu flamboyant

qui dévore de tous côtés.

4Il a tendu son arc comme un ennemi ;[#2.4 v. 5 ; cf. Jr 21.5. – la même formule hébraïque est traduite par ce qui (est) précieux en 1.10+. – Es 42.25. – v. 1.]

sa main droite s'est dressée en adversaire ;

il a tué

tout ce qui charmait les yeux ;

il a répandu sa fureur comme le feu

sur la tente de Sion la belle.

5Le Seigneur est devenu comme un ennemi ;[#2.5 v. 2+. – les deux termes font assonance en hébreu ; on les retrouve en Es 29.2.]

il a englouti Israël,

il a englouti tous ses palais,

il a détruit ses forteresses ;

il a multiplié chez Juda la belle

plaintes et gémissements.

6Il a forcé sa clôture comme celle d'un jardin,[#2.6 ici et au v. 7, les possessifs ( son autel, son sanctuaire ) sont au masculin et se rapportent à Dieu plutôt qu'à Jérusalem. – le mot hébreu n'apparaît qu'ici et sa traduction est incertaine ; certains, d'après des versions anciennes, comprennent : il a ravagé sa hutte (cf. Es 1.8 ; Am 9.11) comme le jardin (cf. Nb 24.6 ; Jl 2.3) ; cf. Jr 52.13 ; 2Ch 36.19. – et traduisent le même mot hébreu ; cf. v. 7,22 ; 1.4,15 ; voir aussi Ps 74.4. – cf. So 3.8.]

il a détruit son lieu de rencontre ;

le Seigneur a fait oublier en Sion

rencontre festive et sabbat ;

dans la fureur de sa colère,

il n'a eu que mépris pour le roi et le prêtre.

7Le Seigneur a rejeté son autel,[#2.7 hébreu ’Adonaï / YHWH . – cf. v. 6 ; Ez 24.21 ; Ps 89.40. – Dt 23.16. – litt. de ses palais, le possessif étant cette fois au féminin. – litt. on a donné de la voix.]

dédaigné son sanctuaire ;

il a livré à l'ennemi

les murailles des palais de Sion ;

des appels ont retenti dans la maison du Seigneur

comme en un jour de rencontre festive.

8Le Seigneur a décidé de détruire[#2.8 cf. Jr 5.10. – v. 1. – pour raser la ville ; cf. 2R 21.13 ; Es 34.11 ; Am 7.7-9. – probablement deux enceintes de hauteur inégale. – le même verbe est habituellement traduit par dépérir ; cf. Es 16.8 ; 19.8 ; 24.4,7 ; 33.9.]

la muraille de Sion la belle ;

il a tendu le cordeau,

il n'a pas retiré sa main

avant d'avoir tout englouti ;

il a mis en deuil rempart et muraille,

l'un et l'autre sont délabrés.

9Ses portes se sont enfoncées dans la terre ;[#2.9 les portes de Sion (possessif féminin). – c.-à-d. en exil ; cf. Dt 28.36 ; 2R 25.7. – cf. Dt 4.6-8 ; Ml 2.6s. – v. 14 ; Ps 74.9. – Ez 7.26.]

il a détruit, brisé leurs verrous.

Son roi et ses princes sont parmi les nations ;

il n'y a plus de loi,

et ses prophètes ne trouvent plus

de vision venant du Seigneur .

10Les anciens de Sion la belle[#2.10 v. 1. – 3.28 ; cf. Es 47.5. – signes de deuil, de tristesse ou de pénitence ; cf. Jr 6.26. – litt. vierges ; cf. v. 13,21. – le même verbe est traduit par laisser couler au v. 18.]

sont assis à terre, ils restent muets ;

ils ont jeté de la poussière sur leur tête,

ils ont mis un sac pour pagne ;

les jeunes filles de Jérusalem

baissent la tête vers la terre.

11Mes yeux s'épuisent à force de pleurer,[#2.11 4.17 ; Ps 69.4+. – 1.20. – litt. mon foie, terme très proche en hébreu du mot habituellement traduit par ; cf. Jb 19.9 ; 29.20. – 3.47s ; mot de la racine signifiant briser ; cf. Jr 8.21s ( blessure ). – litt. de la fille de mon peuple, de même 3.48 ; 4.10 ; cf. 1.6.]

mes entrailles bouillonnent,

ma bile se répand sur la terre

à cause du désastre de la belle, de mon peuple,

parce que des enfants et des nourrissons défaillent

sur les places de la cité.

12Ils disaient à leur mère :[#2.12 litt. leurs mères. – ajoute l'huile ; cf. Dt 7.13 ; Jl 1.10 ; 2.19. – litt. leur souffle (le terme désigne aussi la vie, l'être vivant ; cf. Gn 1.20) se répandait ; cf. Ps 42.5.]

Où sont le blé et le vin ?

Et ils défaillaient comme des blessés

sur les places de la ville,

ils rendaient le souffle

sur le sein de leur mère.

13Que te dirai-je encore ?[#2.13 cf. Es 46.5. – 1.2+ ; Es 51.19. – litt. vierge de la fille de Sion (v. 1+) ; cf. 1.6,15,18 ; Jr 18.13 ; 31.4,21 ; Am 5.2. – v. 11 ; cf. Jr 30.12.]

A qui te comparerai-je, Jérusalem ?

A qui t'égalerai-je,

et quelle consolation te donner, Sion jolie ?

Car ton désastre est aussi grand que la mer :

qui pourra te guérir ?

14Tes prophètes ont eu pour toi des visions[#2.14 v. 9 ; cf. Jr 23.9-40 ; 28 ; 29.8s. – Ez 12.24 ; 13.6ss ; 21.34 ; 22.28. – cf. Jb 6.6 ; un homonyme ( ?) est traduit par badigeon en Ez 13.10-15 ; 22.28. – le verbe hébreu peut aussi avoir le sens d’ exiler ; cf. 1.3 ; 4.22. – sous-entendu : afin que le puisse rétablir ta situation ; le verbe et son complément, traditionnellement traduits par ramener les captifs, font assonance en hébreu ; voir aussi Dt 30.3 ; Jr 29.14 ; Ez 16.53 ; Ps 126.1,4 ; Jb 42.10. – ou oracles ; le terme a aussi le sens de charge ou fardeau ; cf. Es 13.1 ; Jr 23.33.]

illusoires et insipides ;

ils n'ont pas mis à nu ta faute

afin de rétablir ta situation ;

leurs visions ont abouti pour toi

à des sentences illusoires et décevantes.

15Tous les passants, de dégoût,[#2.15 litt. ceux qui passent sur le chemin, comme en 1.12. – formellement, cette précision n'est pas dans le texte, mais elle correspond au sens le plus probable du geste consistant à battre des mains : il s'agit sans doute moins d'approuver que de conjurer le malheur (cf. l'expression française se signer ) ; de même pour les sifflements d'horreur, etc. ; cf. Ps 22.8 ; Jb 27.23 ; Mt 27.39 ; voir aussi Jr 18.16. – litt. la fille de Jérusalem ; cf. 1.6. – cf. 1.1 ; Es 60.15 ; Ez 16.14 ; 27.3s ; Ps 48.3 ; 50.2.]

battent des mains à ton sujet,

ils sifflent d'horreur et hochent la tête

sur Jérusalem la belle :

Est-ce là la ville qu'on appelle

« Beauté parfaite », « Gaieté de toute la terre » ?

16Tous tes ennemis[#2.16 3.46. – litt. trouvé.]

ouvrent la bouche contre toi,

ils sifflent d'horreur et grincent des dents,

ils disent : Nous l'avons engloutie !

C'est bien le jour que nous espérions,

nous l'avons atteint, nous le voyons !

17Le Seigneur a fait ce qu'il avait décidé,[#2.17 Ex 20.5 ; Dt 28.15ss. – v. 2. – cf. v. 3.]

il a accompli sa parole,

ce qu'il avait ordonné aux jours de jadis :

il a rasé, il n'a rien épargné ;

il a fait de toi la joie de l'ennemi,

il a élevé la corne de tes adversaires.

18Leur cœur crie vers le Seigneur.[#2.18 probablement celui des habitants de Jérusalem. – (v. 1) : cf. v. 8 ; l'expression pourrait aussi être lue en apposition à . – litt. les larmes ; cf. Jr 14.17. – ou un oued ; cf. Ps 110.7. – litt. la fille. – 3.49 ; le verbe hébreu signifie aussi se taire.]

Muraille de Sion la belle,

laisse couler tes larmes comme un torrent, jour et nuit !

Ne te donne aucun répit,

et que la pupille de ton œil n'ait pas de repos !

19Lève-toi, crie,[#2.19 le verbe hébreu peut aussi s'appliquer, dans d'autres contextes, à une clameur joyeuse. – cf. Ex 14.24 ; l'expression signifie peut-être ici le début de chaque veille, c.-à-d. trois fois par nuit. – Ps 62.9. – litt. tes paumes 3.41 ; Ps 28.2 ; 44.21 ; 141.2 ; cf. Jg 12.3. – autre traduction le gosier, cf. Gn 1.20. – v. 11s. – litt. à la tête de toutes les rues 4.1 ; Es 51.20.]

au début des veilles de la nuit !

Répands ton cœur comme de l'eau

devant le Seigneur !

Lève tes mains vers lui

pour la vie de tes enfants

qui défaillent de faim

à tous les coins de rues.

20Regarde, Seigneur , vois[#2.20 hébreu YHWH / ’Adonaï, cf. v. 7. – litt. leur fruit ; cf. 4.10 ; Lv 26.29 ; Dt 28.53-57 ; 2R 6.28s ; Es 49.26 ; Jr 19.9 ; Ez 5.10. – v. 22 ; le terme évoque probablement l'image d'enfants à qui l'on tend les bras pour leur apprendre à marcher ; certains pensent qu'il désigne plutôt des enfants pleinement développés, arrivés à terme, par opposition aux avortons.]

qui tu as ainsi traité !

Fallait-il que des femmes dévorent le fruit de leur ventre,

les petits enfants tendrement aimés ?

Que prêtres et prophètes

soient tués dans le sanctuaire du Seigneur ?

21Les adolescents et les vieillards[#2.21 (litt. mes vierges ) cf. 1.18.]

gisent par terre dans les rues ;

mes jeunes filles et mes jeunes gens

sont tombés par l'épée ;

tu as tué, au jour de ta colère,

tu as égorgé, tu n'as épargné personne.

22Tu as convoqué, de tous côtés, ceux qui font mon effroi,[#2.22 formule comparable en Jr 6.25 ; 20.3,10 ; 46.5 ; 49.29 ; Ps 31.14. Autre traduction mes voisins des alentours. – 1.4,15.]

comme en un jour de rencontre festive.

Au jour de la colère du Seigneur ,

il n'y eut ni rescapé ni survivant.

Ceux que j'avais tendrement aimés et élevés,

mon ennemi les a exterminés.

Nouvelle Bible Segond © Société biblique française-Bibli'O, 2002 Première édition de la Bible d’étude : sous la direction de Henri Blocher, Jean-Claude Dubs†, Mario Echtler†, Jean-Claude Verrecchia, coordination Didier Fougeras.
Published by: French Bible Society