Ésaïe 49

Le serviteur du Seigneur (deuxième poème)

1Écoutez-moi,

La lumière des nations

(49.1-8)

Dans ce deuxième chant, le serviteur de Dieu dit lui-même ce qu'il croit de sa personne et de sa mission. Il a conscience d'avoir été connu, formé et appelé par Dieu pour être son porte-parole. Le message qu'il transmet provoque le renouveau du peuple d'Israël et annonce la délivrance de Dieu jusqu'au bout du monde. Le serviteur a traversé une période d'incertitude devant l'apparente inutilité de ses efforts, mais Dieu lui redonne de l'assurance pour accomplir sa mission : il sera une lumière pour l'humanité.

Comme dans le premier poème, Dieu renverse totalement la situation. Le serviteur, au lieu d'être méprisé, est reconnu par les gens puissants ; ceux-ci finissent par reconnaître que Dieu était avec lui pour le bien de tous.

L'extraordinaire singularité de ce poème pose la question de l'identité du serviteur dont la mission de salut est universelle. Il peut s'agir d'Israël, appelé à servir Dieu et à être lumière pour les nations ; ou encore du prophète lui-même.

En raison de son parcours si particulier (vocation au sein de son peuple, réactions de rejet, mission adressée aux nations), la tradition chrétienne a vu dans le serviteur une figure du Messie, envoyé vers le peuple d'Israël, rejeté et appelé à porter le salut jusqu'aux extrémités de la terre.

populations lointaines,

peuples éloignés, soyez attentifs.

Dès avant ma naissance,

le Seigneur m'a appelé ;

j'étais encore au ventre de ma mère

quand il a prononcé mon nom.

2Il a fait de ma parole une épée tranchante[#49.2 Comparer Hébr 4.12 ; Apoc 1.16.]

et il me cache à l'abri de sa main.

Il a fait de mon message une flèche pointue,

dissimulée dans son carquois.

3Il m'a dit :

« C'est toi qui es mon serviteur,

l'Israël dont je me sers

pour manifester ma gloire. »

4Quant à moi, je pensais

m'être donné du mal pour rien,

avoir usé mes forces

sans résultat, pour du vent.

Or le Seigneur garantit mon droit,

mon Dieu détient ma récompense.

5Mais maintenant,

le Seigneur déclare qu'il m'a formé

quand j'étais encore au ventre de ma mère

pour que je sois son serviteur.

Il veut que je ramène à lui

les descendants de Jacob,

que je rassemble près de lui

le peuple d'Israël.

Le Seigneur reconnaît

la valeur de mon service,

mon Dieu est ma force.

6Il m'a dit : « Cela ne suffit pas

que tu sois à mon service,

pour relever les tribus de Jacob

et ramener les survivants d'Israël.

Je fais de toi la lumière des nations,

pour que mon salut s'étende

jusqu'au bout du monde. »

Le grand retour des exilés

7Le Seigneur te parle,

lui le libérateur de son peuple,

l'unique vrai Dieu, le Dieu d'Israël.

Il te déclare, à toi que l'on méprise

et que les gens détestent,

à toi l'esclave des tyrans :

« Quand les rois te verront,

ils se lèveront de leur trône.

Quand les princes t'apercevront,

ils s'inclineront devant toi. »

Ils montreront ainsi leur respect

pour le Seigneur, qui t'a choisi,

pour l'unique vrai Dieu, le Dieu d'Israël,

qui tient parole.

8Voici donc ce que le Seigneur déclare :

« Au moment favorable,

j'ai répondu à ton appel ;

quand est arrivé le jour du salut,

je suis venu à ton secours.

Je t'ai formé pour faire de toi

le garant de mon engagement

envers l'humanité.

Je vais relever le pays

et redistribuer les parts de la terre sainte

aujourd'hui ravagée.

9Je dis aux prisonniers,[#49.9 (v. 8) (v. 9) est parfois traduit]

Le chemin du retour

(49.9-13)

Le serviteur proclame l'intervention du Seigneur au bénéfice des exilés. Les valeurs seront renversées : les esclaves seront couverts d'honneur. Leur retour au pays est annoncé au moyen d'images réjouissantes. Dieu aplanira toutes les difficultés du chemin. Comme un bon berger, il veillera à ce que son troupeau ne manque de rien (Ps 23), ne souffre plus, et il le rassemblera de toutes les nations où il était dispersé.

à ceux qui vivent dans le noir :

“Sortez, venez au jour.”

Ils seront alors comme un troupeau

qui broute le long des chemins

et trouve sa nourriture

sur toutes les collines.

10Ils ne souffriront plus

de la faim ou de la soif.

Ni le vent brûlant du désert

ni le soleil ne leur feront de mal.

Avec amour, je les conduirai

se rafraîchir aux sources.

11Je changerai les hauteurs

en chemins praticables,

je referai les routes.

12Les voici qui arrivent !

Ils reviennent de loin, les uns du nord,

d'autres de l'ouest, par la mer,

d'autres du sud, de l'Égypte. »

13Ciel, manifeste ta joie ;

terre, émerveille-toi ;

montagnes, lancez des acclamations,

car le Seigneur réconforte son peuple,

il montre son amour aux humiliés.

Moi, je ne t'oublie pas

14Jérusalem disait :

Dieu n'abandonne pas son peuple

(49.14-26)

Trois plaintes structurent ces versets ; à chacune d'elles répond une annonce de salut.

La première est une plainte contre Dieu (v. 14). Le peuple doute, se croit abandonné, mais Dieu est tellement attaché à Jérusalem, son enfant, qu'il est incapable de l'oublier. Ces paroles de tendresse émouvante ont réconforté de très nombreux croyants dans tous les âges.

Vient ensuite une plainte sur soi (v. 21) : il n'y a plus d'enfants… Mais le prophète annonce qu'Israël sera comblé d'enfants, originaires de toutes les nations.

La dernière plainte concerne les ennemis, peu enclins en général à lâcher leur butin (v. 24). Pourtant, ce qui semble impossible va se produire : Dieu lui-même combattra ces ennemis, il brisera la puissance de Babylone et les exilés seront libérés.

« Le Seigneur m'a abandonnée,

mon Maître m'a oubliée. »

15Mais le Seigneur répond :

Une femme oublie-t-elle l'enfant qu'elle allaite ?

cesse-t-elle d'aimer l'enfant qu'elle a porté ?

A supposer qu'elle l'oublie,

moi, je ne t'oublie pas :

16j'ai ton nom gravé[#49.16 ou]

sur les paumes de mes mains,

et l'image de tes murailles

ne quitte pas mes yeux.

17Ceux qui vont te rebâtir[#49.17 : d'après le principal manuscrit hébreu d'Ésaïe trouvé à Qumrân et plusieurs versions anciennes ; texte traditionnel]

se dépêchent d'arriver,

tandis que partent loin de toi

ceux qui t'ont démolie,

ceux qui t'ont dévastée.

18Regarde autour de toi et constate :

tes enfants se rassemblent tous

et arrivent vers toi.

J'en fais le serment par ma vie,

dit le Seigneur,

ils seront pour toi

comme un bijou dont on se pare,

comme une ceinture de fiançailles

qu'on se met à la taille.

19Tu es au milieu des ruines,

de quartiers dévastés,

ton pays est dépeuplé.

Mais il sera bientôt

trop étroit pour ses habitants,

tandis que partiront très loin

ceux qui t'avaient fait disparaître.

20Tu te croyais privée de fils,

mais à nouveau tu les entendras dire :

« Je n'ai pas de place,

pousse-toi donc un peu,

que je puisse m'installer. »

21Tu te demanderas alors :

« Qui m'a donné tous ces enfants ?

J'étais privée des miens

et sans espoir d'en avoir d'autres,

exilée et mise à l'écart.

Mais ceux-là, qui les a élevés ?

J'étais restée seule,

et ceux-là, où étaient-ils ? »

22Voici ce que le Seigneur Dieu déclare :

« Je vais faire signe aux nations,

dresser un signal pour les peuples.

Et ils ramèneront tes fils

en les prenant dans leurs bras,

ils ramèneront tes filles

en les portant sur leurs épaules.

23Tu auras, pour tes enfants,

des princesses comme nourrices,

des rois comme éducateurs.

Ils s'inclineront devant toi,

le visage contre terre,

léchant la poussière de tes pieds.

Alors tu reconnaîtras

que je suis le Seigneur,

et que ceux qui comptent sur moi

ne sont jamais déçus. »

24Va-t-on reprendre à l'homme de guerre

le butin dont il s'est emparé ?

Va-t-on arracher à la brute

celui qui est son prisonnier ?

25Oui, et voici ce que déclare le Seigneur :

« Je vais reprendre à l'homme de guerre

celui qu'il avait fait prisonnier,

je vais arracher à la brute

le butin dont il s'est emparé !

Jérusalem, je vais moi-même

prendre à partie tes adversaires

et délivrer tes enfants.

26Je forcerai tes oppresseurs

à manger leur propre chair,

à s'enivrer de leur sang

comme on s'enivre de vin nouveau.

Alors tout être vivant saura

que ton sauveur, c'est moi, le Seigneur,

et que j'ai pris ta cause en mains,

moi, le Dieu fort de Jacob. »

Société biblique française – Bibli'O, 2004
Published by: French Bible Society