Job 29

Dernière réplique de Job : Ah ! les beaux jours d'autrefois !

1Job reprit son plaidoyer en disant :

Le bon vieux temps

(29.1-6)

Souvent Job s'est plaint que Dieu le surveillait (10.1413.2714.16), non pour le protéger, mais pour l'épier. Or, autrefois, Job vivait sous la garde (même verbe en hébreu) de Dieu. Job sait que l'amitié de Dieu était la cause de son bonheur. Ses enfants étaient même le signe tangible de la protection divine.

2Ah ! combien j'aimerais retrouver le passé,

ce temps où je vivais sous la garde de Dieu,

3quand sa lampe brillait au-dessus de ma tête !

Sa lumière m'aidait à traverser la nuit.

4Je me trouvais alors au temps de l'âge mûr,

et l'amitié de Dieu veillait sur ma maison.

5Lui, le Dieu très-grand, était encore avec moi,

et tout autour de moi se tenaient mes garçons.

6A cette époque, je nageais dans l'abondance,

des ruisseaux d'huile s'écoulaient de mon pressoir.

7Lorsque je sortais vers la porte de la ville

Le prestige de Job

(29.7-10)

Job jouissait de la faveur divine, et aussi de la reconnaissance humaine. La porte de la ville était le lieu des réunions publiques. On y rendait la justice, d'où la traduction du mot « porte » par « tribunal » (5.431.21). Ce passage est rédigé dans le style de la littérature de sagesse pour décrire la conduite du juste : elle est tout entière fondée sur l'amitié avec Dieu. Cette alliance avec Dieu se manifeste par une solidarité totale avec les plus faibles.

et que j'allais siéger au conseil sur la place,

8les jeunes gens, en me voyant, se retiraient,

les vieillards se levaient et ils restaient debout.

9Les personnalités arrêtaient leurs discours,

s'imposant le silence, la main sur la bouche.

10Les chefs baissaient le ton, ils devenaient muets.

11J'étais félicité par ceux qui m'entendaient ;

Job le bienfaiteur

(29.11-17)

Les souvenirs de Job sont centrés sur lui-même. Tout tourne à sa seule gloire. En énumérant les bénéficiaires de sa bienfaisance, Job contredit Élifaz. Ce dernier l'avait accusé de dépasser la mesure en prenant pour gage le manteau de son prochain (22.6) et d'abandonner les veuves et les orphelins (22.9). Or, le respect pour le droit lui servait de manteau et il secourait l'orphelin tout comme il mettait un peu de joie au cœur de la veuve.

en me voyant, tous m'assuraient de leur estime :

12je sauvais le pauvre qui m'appelait à l'aide

et l'orphelin que personne ne secourait.

13Ceux qui mouraient me laissaient leur bénédiction,

je remettais un peu de joie au cœur des veuves.

14Le sens de la justice était mon vêtement,

mon respect pour le droit un manteau, un turban.

15Pour l'aveugle, j'étais les yeux qui lui manquaient,

pour l'infirme, les pieds qui lui faisaient défaut.

16Pour les malheureux, j'étais devenu un père,

je donnais tous mes soins au cas de l'étranger.

17Mais je cassais les dents à tous les criminels,

arrachant de leurs crocs la proie qu'ils détenaient.

18Je me disais alors : « Je mourrai dans mon nid

Un avenir tout tracé

(29.18-20)

Selon le principe de la rétribution, un comportement aussi vertueux aurait dû garantir à Job une vie paisible et surtout très longue. D'après une croyance populaire, le Phénix, oiseau mythique, était capable de retrouver une vie nouvelle tous les mille ans. Pour le juste, Dieu est une source de vie, de fraîcheur et de force (cf. les images du Phénix, de l'arbre et de l'arc).

comme l'oiseau Phénix, et revivrai longtemps.

19Je suis comme un arbre qui a le pied dans l'eau ;

la rosée de la nuit rafraîchit mes rameaux.

20Je pourrai retrouver un prestige tout neuf

et ma force d'agir comme un arc bien tendu. »

21En ce temps-là, on m'écoutait, on attendait,

Job, l'idéal du sage

(29.21-25)

Job revient sur l'influence et la fascination qu'il exerçait auprès de ses compatriotes. Avec audace, il reprend à son propre compte des expressions qui, partout ailleurs, renvoient à la bonté de Dieu ou du roi. Par exemple, l'averse du printemps était une faveur qu'on attendait de Dieu (Deut 11.14) ou du roi (Prov 16.15). De même, l'expression « sur mon visage un signe bienveillant » est réservée à Dieu (Ps 4.7) ou au roi (Prov 16.15). Job finit par s'identifier explicitement à un « roi ».

on se taisait pour que je donne mon avis.

22Quand j'avais terminé, on ne discutait pas,

sur les gens mes propos s'écoulaient goutte à goutte.

23Et les gens m'attendaient, comme on attend la pluie,

comme on aspire à voir l'averse de printemps.

24Quand je leur souriais, ils n'osaient pas y croire,

guettant sur mon visage un signe bienveillant.

25Je siégeais à leur tête et leur montrais la route,

vivant avec eux comme un roi parmi ses troupes,

comme quelqu'un qui console les affligés.

Société biblique française – Bibli'O, 2004
Published by: French Bible Society