The chat will start when you send the first message.
1Une autre fois, sept frères et leur mère furent arrêtés. Le roi voulait qu'on les force à manger de la viande de porc, interdite par la loi de Dieu ; à cet effet, il les fit battre à coups de fouet et de nerf de bœuf.[#7.1 : voir la note sur 6.18.]
2L'un d'eux prit la parole au nom des autres et dit au roi : « Qu'espères-tu apprendre ou obtenir de nous en nous traitant ainsi ? Sache que nous sommes prêts à mourir plutôt que d'être infidèles aux lois de nos ancêtres. »
Pour une mère, enfanter sept fils était considéré comme une bénédiction de Dieu. Ainsi, il est souhaité à la femme stérile d'enfanter sept fois (1 Sam 2.5).
3Le roi fut saisi d'une violente colère ; il donna l'ordre de mettre sur le feu des grils et des chaudrons.
4Dès qu'ils furent brûlants, il ordonna de trancher la langue à celui qui avait parlé au nom des autres ; de plus, il le fit scalper, il lui fit couper les pieds et les mains, tout cela sous les yeux de ses frères et de sa mère.
5Quand on l'eut complètement mutilé, le roi commanda de l'approcher du feu et de le jeter encore vivant sur un gril. Tandis que l'odeur de la chair brûlée se répandait autour du gril, les autres frères et la mère s'encourageaient mutuellement à mourir héroïquement ; ils disaient :
6« Le Seigneur, notre Dieu, nous voit et il ne reste certainement pas insensible à notre sort. Car Moïse a déclaré dans le cantique même où il accusait son peuple : “Le Seigneur sera sensible au sort de ses serviteurs.” »[#7.6 Voir Deut 32.36.]
Le mot grec qui correspond à « scalper » signifie exactement « scalper à la façon des Scythes ». Cette fois encore, l'allusion aux Scythes signifie que le roi et sa cour ont atteint le comble de la sauvagerie (4.43-50).
Bien que très peu de textes de l'Ancien Testament parlent explicitement de vie après la mort, les données archéologiques (l'examen des tombes) révèlent que les Israélites croyaient en une forme de vie après la mort, et même en l'intercession des morts. Les récits bibliques sur Élie et Élisée (1 Rois 17.222 Rois 4.35) évoquent déjà des cas de résurrection, et le chap. 37 d'Ézékiel l'envisage même à partir de corps décomposés. Plus tard, d'autres textes parlent de résurrection des morts en vue du jugement divin. On peut lire Dan 12.2 : « Beaucoup de gens qui dorment au fond de la tombe se réveilleront, les uns pour la vie éternelle, les autres pour la honte. » En 2 Mac , la croyance en la résurrection découle de la confiance en la justice de Dieu : à ceux qui ont accepté de sacrifier leur vie pour Dieu, auxquels on ne peut plus rendre justice en ce monde, Dieu ne peut que rendre une vie nouvelle et supérieure à celle qu'ils ont quittée, une vie éternelle. Dieu ne saurait être en reste.
7Quand le premier des frères fut mort de cette manière, on amena le second pour le maltraiter à son tour. Après lui avoir arraché les cheveux avec la peau du crâne, on lui demanda : « Eh bien, vas-tu manger cette viande de porc, plutôt que d'être mis en pièces, membre après membre ? » –
8« Non ! » répondit-il dans la langue de ses ancêtres. C'est pourquoi on lui fit subir la même série de tortures qu'au premier.[#7.8 : il s'agit sans doute de l'hébreu, bien que la langue couramment parlée à cette époque fût l'araméen.]
9Au moment d'expirer, il dit au roi : « Criminel ! Tu nous ôtes la vie présente ; mais le Roi du monde nous ressuscitera pour une vie nouvelle, éternelle, puisque nous mourons par obéissance à ses lois. »[#7.9 : comparer Dan 12.2 ; Hébr 11.35.]
10Après celui-ci, on infligea le même traitement au troisième. Quand on lui ordonna de présenter sa langue, il le fit aussitôt et il tendit ses mains sans trembler.
11Il déclara avec fermeté : « C'est le Dieu du ciel qui m'a accordé ces membres ; par fidélité à ses lois j'accepte d'en être privé, car j'ai l'assurance qu'il me les rendra. »
12Le roi lui-même et ceux qui l'entouraient furent impressionnés par le courage de ce jeune homme, qui semblait indifférent à ses souffrances.
13Dès qu'il fut mort, on maltraita le quatrième avec la même cruauté.
14Sur le point de mourir, il dit au roi : « Qu'il est bon d'avoir une espérance quand on est mis à mort par les hommes ! Dieu a promis, en effet, de nous relever de la mort ! Mais, pour toi, il n'y aura pas de résurrection , pas de vie nouvelle. »
15Immédiatement après, on amena le cinquième au supplice.
16Celui-ci, fixant les yeux sur le roi, lui dit : « Tu as le pouvoir de faire ce que tu veux parmi les hommes, bien que tu sois mortel comme eux. Mais ne crois pas que Dieu ait abandonné notre peuple !
17Tu ne perds rien pour attendre : tu feras l'expérience de son immense puissance, quand il sévira contre toi et tes descendants. »[#7.17 : allusion à la fin dramatique d'Antiochus et à la mort violente de ses fils et petits-fils (voir chap. 9 ; 14.2 ; 1 Mac 11.17 ; 13.31).]
18Puis ce fut le tour du sixième. Avant de mourir, il dit au roi : « Tu aurais tort de te faire des illusions ! Si nous souffrons ainsi, c'est par notre faute, car notre peuple a péché contre son Dieu. C'est pourquoi des malheurs aussi terribles nous sont arrivés.[#7.18 Comparer v. 32 ; 5.17.]
19Mais ne t'imagine pas que tu resteras impuni, toi qui as eu l'audace de déclarer la guerre à Dieu lui-même ! »
20Quant à la mère, elle fut admirable au plus haut point et mérite bien qu'on se souvienne d'elle. En l'espace d'un seul jour, elle vit mourir ses sept fils et, pourtant, elle supporta cela avec vaillance, car elle mettait sa confiance dans le Seigneur.
21Avec une fermeté remarquable, elle encouragea chacun d'eux dans la langue de ses ancêtres. Les paroles qu'elle leur adressait témoignaient à la fois d'une sensibilité féminine et d'un courage viril. Elle leur disait :
22« Je ne sais pas comment votre existence a commencé dans mon ventre. Ce n'est pas moi qui vous ai donné le souffle de la vie, ce n'est pas moi qui ai mis en place toutes les parties de votre corps.
23Le Créateur du monde est à l'origine de toutes choses, c'est lui qui forme les humains dès qu'ils sont conçus. Eh bien, il aura pitié de vous et vous rendra le souffle de la vie, puisque vous acceptez maintenant d'en être privés pour rester fidèles à ses lois. »
Les paroles de la mère expriment un renoncement radical. Elle refuse de faire passer son amour pour ses enfants avant la fidélité à Dieu, reconnaissant par là qu'ils doivent avant tout leur vie à Dieu, qu'ils appartiennent à Dieu avant d'appartenir à leurs parents ou à eux-mêmes. Elle exhorte donc ses fils à se souvenir qu'ils ne sont que les dépositaires d'un souffle, qu'ils ne doivent pas chercher à s'approprier leur existence terrestre au prix de la fidélité à la volonté du Seigneur.
Pour l'auteur de 2 Mac , les malheurs qui accablent le peuple élu sont dus aux péchés qu'il a commis contre Dieu, et non au fait que Dieu l'aurait abandonné aux mains de ses ennemis. A ceux qui, confrontés aux pires épreuves, exprimeraient leur doute et leur désir de révolte contre un Dieu supposé tout-puissant, mais qui semble rester passif et indifférent face à la souffrance des hommes, le texte répond que l'amour de Dieu n'est pas en cause. C'est la responsabilité humaine qu'il faut interroger. Contrairement à Job, le peuple élu ne peut pas prétendre ne pas avoir péché.
24Le roi Antiochus crut qu'elle se moquait de lui et supposa que ses propos étaient injurieux. C'est pourquoi il chercha à convaincre le plus jeune fils, qui était encore en vie, non seulement par des paroles, mais aussi par des serments : il jura de le rendre riche et très heureux, d'en faire un “ami du Roi” et de lui confier des fonctions importantes, s'il renonçait aux traditions de ses ancêtres.[#7.24 : ne sachant pas l'hébreu, Antiochus ne comprenait pas ce qu'elle disait (comparer v. 27). – : voir 2.18 et la note.]
25Mais le jeune homme ne fit aucun cas de ce que le roi disait. Alors celui-ci fit approcher la mère et la pressa de conseiller à son fils de saisir cette chance de salut.
26Il insista longuement et elle finit par accepter de parler à son fils.
27Elle se pencha donc vers lui et réussit à mystifier le tyran cruel en prononçant ces paroles dans la langue de leurs ancêtres : « Mon fils, aie pitié de moi. Rappelle-toi que je t'ai porté neuf mois dans mon ventre et que je t'ai allaité trois ans. J'ai pris soin de toi, je t'ai nourri et élevé jusqu'à ce jour.
28Je t'en prie, mon enfant, contemple le ciel et la terre, regarde tout ce qui s'y trouve. Reconnais que Dieu a fait tout cela à partir de rien et qu'il a créé les humains de la même façon.
29Ne crains donc pas ce bourreau, mais accepte de mourir avec autant de courage que tes frères. Je pourrai ainsi te retrouver, avec tes frères, lorsque Dieu nous manifestera sa bonté. »
30Elle avait à peine fini de parler que le jeune homme s'écria : « Qu'attendez-vous encore, vous autres ? Je ne veux pas obéir à l'ordre du roi, mais aux commandements de la loi que Dieu a donnée à nos ancêtres par l'intermédiaire de Moïse.
31Quant à toi, roi Antiochus, qui as imaginé tous les maux qui se sont abattus sur le peuple juif, tu n'échapperas pas à la main de Dieu !
32Pour nous, nous avons péché et c'est pourquoi nous devons souffrir maintenant.[#7.32 Comparer v. 18 ; 5.17.]
33Notre Seigneur, le Dieu vivant, nous fait sentir sa colère pour peu de temps, afin de nous corriger et de nous éduquer. Ensuite, il se réconciliera de nouveau avec nous, ses serviteurs.
34Mais toi, l'ennemi du Seigneur, le plus ignoble de tous les hommes, ne t'enfle pas d'un fol orgueil ! Toi qui portes la main sur les enfants de Dieu, ne te repose pas sur de faux espoirs !
35Car le Dieu tout-puissant voit tout et tu n'as pas encore échappé à son jugement !
36Mes frères, après avoir souffert un moment, sont tombés par fidélité à l'alliance de Dieu et c'est la vie éternelle qui les attend ; mais toi, Dieu te jugera et t'infligera la juste peine que ton arrogance mérite.[#7.36 : le texte grec est obscur et la traduction incertaine.]
37Tout comme mes frères, je suis prêt à sacrifier mon corps et ma vie pour les lois de mes ancêtres. Je demande à Dieu d'avoir bientôt pitié de notre peuple, mais de te tourmenter et de t'éprouver pour t'amener à reconnaître toi-même que lui seul est Dieu.
38Puissions-nous être les derniers, mes frères et moi, à subir la colère que le Tout-Puissant a déchaînée à bon droit sur tout notre peuple ! »
39Le roi prit très mal ces paroles qui le défiaient. Furieux, il traita le jeune homme encore plus cruellement que les autres.
40Cependant, celui-ci aussi demeura fidèle jusqu'à la mort en mettant toute sa confiance dans le Seigneur.
41Finalement, la mère fut exécutée après tous ses fils.
42Mais j'en ai maintenant assez dit sur les repas sacrificiels et sur ces tortures incroyables.
Avec le martyre des sept frères on atteint le point culminant du récit de la persécution. A ce stade, l'expiation prend fin, la prière du plus jeune frère (7.37) est exaucée, et la colère de Dieu se transforme par conséquent en compassion pour son peuple. La deuxième phase du récit s'ouvre ; elle va conduire à la libération complète de Jérusalem. Elle commence et se termine d'ailleurs de la même manière : par une victoire sur Nicanor.