Deutéronome 9

Israël n'a aucun mérite

1Israélites, écoutez ! Vous êtes maintenant sur le point de traverser le Jourdain. Vous allez mettre en fuite des nations plus nombreuses et plus puissantes que vous, et vous vous emparerez de villes imposantes, dont les murailles s'élèvent jusqu'au ciel.

2Vous déposséderez en particulier les Anaquites, gens puissants et de haute taille, dont on dit, comme vous le savez : « Qui peut subsister devant les descendants d'Anac ? »[#9.2 Voir Nomb 13.22 et la note.]

3Vous pourrez constater sous peu que le Seigneur votre Dieu marche devant vous, comme un feu qui détruit tout ; il les écrasera, les obligera à céder devant vous. Vous les déposséderez et vous les exterminerez sans tarder, comme le Seigneur vous l'a promis.

L'annonce de la conquête

(9.1-6)

Ce passage introduit le long récit suivant (9.7–10.11) et reprend plusieurs thèmes déjà abordés : la puissance des peuples que Dieu va chasser devant Israël (v. 1-2 ; 3.4-6 ; 7.17-21), la gratuité du salut accordé par Dieu (v. 4-6 ; 4.37 ; 7.7-8), la fidélité de Dieu à sa promesse (v. 5 ; 7.8). Un élément nouveau : la mauvaise conduite des peuples cananéens dépossédés par Israël (Gen 15.16). Dans la logique du Deutéronome, Dieu permet que ces populations soient facilement dépossédées de leurs territoires parce qu'elles ne respectent pas la loi. Cette facilité de la conquête constitue aussi un avertissement pour Israël : ce qu'il a pris sans effort, il le perdra sans délai si, à son tour, il ne respecte pas la loi de Dieu.

4Lorsque le Seigneur votre Dieu les aura chassés devant vous, n'allez pas vous vanter en disant : « Le Seigneur nous permet de prendre possession de ce pays parce que nous l'avons mérité ! » En réalité, c'est à cause de la mauvaise conduite de ces peuples que le Seigneur les mettra en fuite à votre approche

5et que vous pourrez prendre possession de leur pays. Ce n'est vraiment pas parce que vous le mériteriez par votre loyauté ! Le Seigneur chassera ces peuples à cause de leur mauvaise conduite, et pour réaliser la promesse faite à vos ancêtres Abraham, Isaac et Jacob.

6Sachez-le donc, le Seigneur votre Dieu vous laissera vous emparer de ce bon pays, mais non parce que vous le mériteriez. En fait, vous êtes un peuple de rebelles !

Le veau d'or : la faute du peuple

7Souvenez-vous comment vous avez provoqué la colère du Seigneur votre Dieu dans le désert ! Ne l'oubliez jamais ! Depuis le jour où vous avez quitté l'Égypte jusqu'à votre arrivée ici, vous n'avez pas cessé d'être en révolte contre lui.

8Au mont Horeb en particulier, vous avez mis le Seigneur dans une si grande colère qu'il voulait vous exterminer.

9J'étais monté sur la montagne pour y recevoir les tablettes de pierre, document de l'alliance que le Seigneur avait conclue avec vous. Je suis resté quarante jours et quarante nuits sur la montagne, sans rien manger ni boire.[#9.9 Voir Ex 24.18.]

10Le Seigneur Dieu m'a remis les deux tablettes de pierre sur lesquelles il avait écrit lui-même tous les commandements qu'il vous avait communiqués du milieu du feu, le jour où vous étiez rassemblés au pied de la montagne.

Le veau d'or et les tablettes de l'alliance

(9.7-17)

Le taureau est un symbole de force. Les divinités représentées sous cette forme sont nombreuses en Orient, en particulier le grand dieu Baal. Par dérision, les auteurs bibliques nomment « veau » cette image divine conçue à l'origine pour représenter le Dieu d'Israël. Mais le Seigneur est justement celui qu'on ne peut représenter (5.8-9). Les tablettes de l'alliance sont les copies du contrat conclu entre Dieu et son peuple, contenant les dispositions qui règlent les relations entre les deux parties. Moïse brise les tablettes pour montrer que même un objet contenant la parole de Dieu ne peut remplacer une relation directe de confiance.

11Au bout des quarante jours et quarante nuits, après m'avoir remis le document de l'alliance,

12le Seigneur m'a dit : « Redescends tout de suite d'ici, car le peuple que tu as fait sortir d'Égypte a commis un grave péché. Ils n'ont pas tardé à s'écarter du chemin que je leur avais indiqué et se sont fabriqué une idole en métal fondu. »

13Et le Seigneur a ajouté : « Eh bien, je l'ai constaté, ce peuple est un peuple de rebelles !

14Laisse-moi intervenir : je vais les exterminer, je vais effacer tout souvenir d'eux sur la terre. Ensuite je ferai naître de toi une nation plus puissante et plus nombreuse qu'eux. »

15Je suis redescendu de la montagne, qui semblait en feu. Je tenais des deux mains les tablettes de pierre, document de l'alliance.

16J'ai vu alors que vous aviez effectivement péché contre le Seigneur votre Dieu : vous aviez fabriqué un veau en métal fondu ! Vous n'aviez pas tardé à vous écarter du chemin indiqué par le Seigneur.

17C'est pourquoi j'ai jeté les deux tablettes de pierre que je tenais et je les ai fracassées sous vos yeux.[#9.17 Voir Ex 32.19.]

Le veau d'or : Moïse intercède

18Ensuite je suis tombé à terre devant le Seigneur, et je suis resté là de nouveau quarante jours et quarante nuits, sans rien manger ni boire. J'ai fait cela à cause du péché que vous aviez commis : vous aviez agi d'une manière qui déplaît au Seigneur et qui l'irrite.

19Je redoutais la colère que le Seigneur ressentait contre vous, colère si ardente qu'il voulait vous exterminer. Pourtant, cette fois-là encore, le Seigneur a entendu ma prière.

20Sa colère était particulièrement vive à l'égard d'Aaron et il voulait le faire mourir, mais j'ai prié pour lui aussi ce jour-là.

21J'ai pris le veau que vous aviez fabriqué, œuvre de votre péché, et je l'ai jeté dans le feu. Puis j'ai écrasé ce qui restait, je l'ai réduit en fine poussière, et j'ai jeté cette poussière dans le torrent qui descend de la montagne.

Rappel des infidélités d'Israël

(9.7–10.11)

Ce long développement expose deux idées principales : Israël, depuis qu'il existe en tant que peuple, n'a jamais été vraiment fidèle à Dieu (9.24) et Moïse, par sa prière, a toujours obtenu le pardon pour le peuple infidèle, tenant ainsi un rôle de médiateur entre Dieu et Israël (9.1825-2910.10) ou entre Dieu et un individu en particulier (9.20-21).

22A Tabéra, à Massa, à Quibroth-Taava, vous avez aussi provoqué la colère du Seigneur.[#9.22 : voir Nomb 11.1-3 ; : voir Ex 17.1-7 ; : voir Nomb 11.31-34.]

23Et à Cadès-Barnéa, quand il voulut vous envoyer en expédition en vous disant : « Allez vous emparer du pays que je vous donne », vous avez désobéi aux ordres du Seigneur votre Dieu. Vous n'avez pas eu confiance en lui et vous n'avez pas tenu compte de ce qu'il vous disait.[#9.23 : Comparer 1.19-46 ; Nomb 13.26.]

24Depuis qu'il vous connaît, vous avez toujours été rebelles à l'égard du Seigneur.[#9.24 : d'après l'ancienne version grecque ; texte hébreu traditionnel :]

25Lorsque le Seigneur a menacé de vous exterminer, je suis tombé à terre devant lui et je suis resté ainsi quarante jours et quarante nuits.

26Je lui ai adressé cette prière : « Seigneur Dieu, ne détruis pas le peuple qui t'appartient, le peuple que tu as libéré et fait sortir d'Égypte, grâce à ton autorité souveraine et à ta puissance irrésistible.

27Souviens-toi de tes serviteurs Abraham, Isaac et Jacob ! Ne prête pas attention à l'insoumission, à la méchanceté et aux péchés de ce peuple.

28Il ne faut pas qu'on puisse dire, dans le pays d'où tu nous as fait sortir : “Le Seigneur n'était pas capable d'amener ces gens dans le pays qu'il leur avait promis”, ou encore : “Il ne les aimait pas, et il les a délivrés seulement pour les laisser mourir dans le désert.”

29Seigneur, ils sont ton peuple, ils t'appartiennent, eux que tu as libérés en déployant ta force et ta puissance irrésistibles. »

La prière de Moïse

(9.18-29)

Moïse rappelle comment sa prière a sauvé Israël de la colère de Dieu (v. 18-19, 26-29 ; 10.10 ; comparer Ex 32.11-1431-32Nomb 14.13-20). La supplication (v. 26-29) évoque la grandeur de Dieu, sa fidélité, sa parole, sa réputation chez les autres nations et les liens personnels qu'il a établis avec Israël. L'initiative du pardon vient donc de Dieu seul et ne dépend pas des dispositions des Israélites : Dieu pardonne parce qu'il est Dieu et non parce que le peuple aurait amélioré sa conduite. Le geste étrange de Moïse, au v. 21, concernant les restes de la statue, semble être une sorte d'épreuve qu'il fait subir aux coupables.

Société biblique française – Bibli'O, 2004
Published by: French Bible Society