Job 13

Réplique de Job (suite) : Il veut un libre dialogue avec Dieu

1Voilà tout ce que j'ai observé de mes yeux,

Non au charlatanisme !

(13.1-19)

La vraie sagesse repose avant tout sur l'observation et l'écoute. Or, les charlatans ne savent ni observer, ni écouter. Ils préfèrent défendre leur thèse, pensant ainsi défendre Dieu, plutôt que d'écouter la voix dissonante de l'expérience. Job ne se sent pas compris et c'est pourquoi il les invite à se taire et à écouter. Polémiquer avec Dieu est périlleux : en parlant de la sorte, Job risque sa vie. C'est pourquoi, à la différence de ses visiteurs, il ne tient pas de discours mensonger. Il sait qu'il est dans son droit et que personne ne pourra le contester. Le lecteur doit toutefois attendre la fin de cet interminable procès pour voir cette victoire espérée se concrétiser (42.7).

entendu de mes propres oreilles et compris.

2Tout ce que vous savez, je le sais, moi aussi,

et je ne me crois pas plus stupide que vous !

3Mais c'est au Dieu très-grand que moi, je veux parler :

je veux me plaindre à lui.

4Vous, vous cachez la vérité sous le mensonge,

vous offrez tous des remèdes de charlatan.

5Qui saura donc vous faire taire tout à fait ?

En vous taisant vous passeriez pour des gens sages !

6Écoutez donc plutôt quand j'exprime ma plainte

et soyez attentifs à ma protestation.

7Pensez-vous servir Dieu en déformant les faits ?

Prendrez-vous sa défense à coups de fausses preuves ?

8Montrerez-vous pour Dieu de la partialité ?

Prétendez-vous pouvoir plaider en sa faveur ?

9Et s'il vous inspectait, serait-ce bon pour vous ?

On ne trompe pas Dieu comme l'on trompe un homme !

10Si vous avez, même en secret, du parti pris,

il aura sûrement un reproche à vous faire.

11Ne redoutez-vous pas la majesté de Dieu,

n'êtes-vous pas saisis par la peur qu'il inspire ?

12Vos arguments ne sont que de la poudre aux yeux,

et vos raisonnements des murailles de boue.

13Taisez-vous devant moi ! A mon tour de parler !

Et peu importe alors ce qui m'arrivera !

14Me voilà prêt à tout, même à risquer ma vie.[#13.14 Texte lu par l'ancienne version grecque ; en hébreu le verset commence par]

15Que Dieu me tue, s'il veut, je n'espère plus rien ;[#13.15 Une autre tradition textuelle juive propose]

mais devant lui, je veux défendre ma conduite.

16Et si j'y réussis, ce sera ma victoire,

car Dieu n'admet personne de mauvaise foi.

17Écoutez sérieusement ce que j'ai à dire,

ouvrez vos oreilles à mes explications.

18Eh bien, je me prépare à aller en justice,

et j'ai la conviction que je suis dans mon droit.

19Dès lors, qui osera contester mon bon droit ?

Je suis prêt, si j'ai tort, à me taire et mourir.

20Mon Dieu, épargne-moi deux choses seulement,

Dieu serait-il rancunier ?

(13.20-28)

Job poursuit sa défense. Il est si sûr de son droit qu'il accorde le choix à Dieu : il peut se présenter comme accusateur ou comme accusé (v. 22). Si Job doit être l'accusé, que Dieu commence par lui révéler ses fautes. Job est convaincu qu'à cette question, déjà posée à ses visiteurs (6.2410.2), Dieu ne pourra rien répondre. A moins que Dieu ne décide de lui imputer ses fautes de jeunesse ! Paradoxalement, Job en vient à utiliser l'équation qu'il n'avait cessé de combattre : souffrance égale châtiment dû à une faute. Mais accablé d'une telle souffrance, qui n'aurait pas le droit de se contredire ? Dieu serait-il rancunier et vindicatif au point de punir un adulte des actes irresponsables commis pendant sa jeunesse ?

et je pourrai enfin me présenter à toi :

21D'abord, délivre-moi de ta main qui m'accable,

ne laisse plus peser l'épouvante sur moi.

22Prends la parole ensuite, et je te répondrai,

ou bien je parlerai, et tu répliqueras.

23Combien de torts m'attribues-tu, combien de fautes ?

Fais-moi savoir en quoi je t'ai désobéi.

24Pourquoi détournes-tu ton visage de moi,

et me traites-tu comme un de tes ennemis ?

25Qui donc pourchasses-tu ? – Une feuille qui vole !

Qui poursuis-tu sans fin ? – Un brin de paille sèche !

26Tu écris contre moi un rapport bien sévère,

tu me fais supporter mes fautes de jeunesse.

27Tu entraves mes pieds,[#13.27 Comparer 33.11.]

tu gardes l'œil fixé sur tous mes faits et gestes,

tu vas jusqu'à noter les traces de mes pas !

28Mais ma vie se défait comme un bois vermoulu

ou comme un vêtement dévoré par les mites.

Société biblique française – Bibli'O, 2004
Published by: French Bible Society