1 Samuel 1

Anne au temple de Silo

1Il y avait un homme de Ramataïm-Tsophim, de la région montagneuse d'Ephraïm, nommé Elqana, fils de Yeroham, fils d'Elihou, fils de Tohou, fils de Tsouph, Ephratite,[#1.1 cf. 9.1 ; Jg 13.2 ; 17.1 ; 19.1. – (ou Ramataïm-des-Tsouphites, ou encore Ramataïm-des-Guetteurs ) : sans doute un autre nom de la localité de Rama, mentionnée au v. 19, puis en 2.11 ; 7.17 etc., et située dans (cf. Jos 17.15). Certains considèrent que seul est une variante de Rama, et modifient le mot suivant pour lire Tsouphi (c.-à-d. le Tsouphite ), qu'ils rapportent à . – cf. 1Ch 6.11s. – peut être compris comme un équivalent d’ Ephraïmite (ainsi ; cf. Jg 12.5 ; 1R 11.26) ou comme indiquant l'appartenance au clan judéen d'Ephrata, plusieurs fois associé à la région de Beth-Léhem (cf. 1S 17.12 ; Rt 1.2). Cf. 1Ch 6.18-23.]

2qui avait deux femmes. Le nom de l'une était Anne et le nom de la seconde Peninna ; Peninna avait des enfants, mais Anne n'en avait pas.[#1.2 hébreu Hanna, qui signifie gracieuse . Le nom de semble évoquer le « corail » ou la « perle ». Les termes grâce et perle sont rapprochés dans la maxime de 7.19, selon le texte hébreu : « La grâce vaut mieux que les perles. » – Le thème de la dont l'une est féconde et l'autre stérile, se trouve également en Gn 16 ; 29.30s ; 30.1s.]

3Chaque année, cet homme montait de sa ville à Silo, pour se prosterner devant le Seigneur (YHWH) des Armées et pour lui offrir des sacrifices. Là se trouvaient les deux fils d'Eli, Hophni et Phinéas, prêtres du Seigneur .[#1.3 litt. de jours en jours, comme en 2.19 ; Ex 13.10 ; Jg 11.40 ; 21.19. Il s'agit de l'un des pèlerinages annuels, probablement celui d'automne ; voir aussi Ex 23.17 ; Dt 16.16 ; Lc 2.41. – le verbe monter, outre sa valeur ordinaire (Rama était située géographiquement plus bas que ), a parfois dans la Bible une valeur théologique, c'est se rendre au sanctuaire, donc s'approcher de Dieu (cf. Jg 1.9). – localité dont le sanctuaire abritait alors le coffre de l'alliance (3.3 ; voir aussi Jos 18.1 ; Jg 21.19ss). – première occurrence dans la Bible de ce ou titre divin (hébreu YHWH tseva'oth ) ; voir aussi 4.4 ; 2S 5.10 ; 6.2 ; Es 1.9. – Voir]

4Le jour où Elqana offrait son sacrifice, il donnait des parts à sa femme Peninna, ainsi qu'à tous les fils et filles de celle-ci.[#1.4 dans le cas du de paix (Lv 3), la majeure partie de la viande revenait au propriétaire de l'animal offert, qui la mangeait en compagnie de sa famille et de ses proches ; cf. Dt 12.18.]

5Mais il donnait à Anne une part d'honneur ; car il aimait Anne, bien que le Seigneur l'eût rendue stérile.[#1.5 traduction probable d'une expression unique en hébreu, dont le sens n'est pas assuré, litt. une part de deux narines (ou de visage ). On a parfois pensé que cela pourrait signifier avec déplaisir, car le nez était associé à l'idée de colère ; il semble plus probable qu'il s'agissait de quelque chose qu'on ose présenter devant le visage de quelqu'un, c.-à-d. une part honorifique . Le grec a lu à Anne, il ne donnait qu'une seule part, car elle n'avait pas d'enfant, bien qu'il l'aimât . – litt. eût fermé sa matrice ; de même au v. 6. Dans la perspective des temps bibliques, c'est Dieu qui rend une femme féconde ou stérile, cf. Gn 16.2 ; 29.31 etc.]

6Sa rivale ne cessait de la contrarier, parce que le Seigneur l'avait rendue stérile.[#1.6 cf. Gn 16.4-6.]

7D'année en année il faisait ainsi, et chaque fois qu'Anne montait à la maison du Seigneur Peninna la contrariait de la même manière. Alors elle pleurait et elle ne mangeait pas.[#1.7 ( Elqana ) cf. v. 4s. – litt. elle montait ; a lu le pluriel ils montaient . – litt. elle la contrariait.]

8Elqana, son mari, lui dit : Anne, pourquoi pleures-tu ? Pourquoi ne manges-tu pas ? Pourquoi ton cœur est-il triste ? Est-ce que je ne vaux pas mieux pour toi que dix fils ?[#1.8 cf. Rt 4.15.]

9Après qu'ils eurent mangé et bu à Silo, Anne se leva. Eli, le prêtre, était assis sur son siège, près du montant de la porte du temple du Seigneur .[#1.9 Litt. après avoir mangé à Silo et après avoir bu… ; LXX après qu'ils eurent mangé à Silo, Anne se leva et elle se tint devant le Seigneur ; au lieu de à Silo, certains croient devoir lire après avoir mangé la viande bouillie (cf. 2.13) ou Anne se leva toute seule . – litt. sur le siège (cf. 4.13) ; le terme désigne aussi le trône du roi. – Voir]

10Elle, amère, se mit à prier le Seigneur et à pleurer abondamment.

11Elle fit un vœu, en disant : Seigneur (YHWH) des Armées, si tu daignes regarder mon affliction, si tu te souviens de moi et ne m'oublies pas, si tu me donnes une descendance, à moi qui suis ta servante, je le donnerai au Seigneur pour tous les jours de sa vie, et le rasoir ne passera pas sur sa tête.[#1.11 cf. Nb 30.2-6 ; Ps 50.14. – litt. une descendance d'hommes, expression unique dans la Bible ; on comprend habituellement un enfant mâle . – le mot hébreu correspondant (aussi au v. 16) peut aussi désigner une esclave. Ici il s'agit simplement d'une formule de politesse courante ; cf. 25.41 ; Gn 12.16 ; 18.3 ; Ex 21.7. – les cheveux non coupés étaient un signe de la consécration d'un homme au service de Dieu ; cf. Nb 6.5 ; Jg 5.2 ; 13.5 ; 16.17. Samuel est explicitement désigné comme nazir dans LXX, dans un ms de et en Siracide 46.13 (selon le texte hébreu) : « Aimé de son peuple et agréable à son créateur, celui qui fut demandé dès le sein de sa mère, consacré (= nazir ) au Seigneur dans la fonction prophétique, Samuel juge et prêtre. » (Voir aussi « Samuel dans le Siracide », p. 358).]

12Comme sa prière se prolongeait devant le Seigneur , Eli observait sa bouche.

13Anne parlait dans son cœur ; seules ses lèvres remuaient, mais on n'entendait pas sa voix. Eli pensa qu'elle était ivre.[#1.13 litt. sur son cœur . – à la suite du repas sacrificiel (cf. v. 9).]

14Il lui dit : Jusqu'à quand resteras-tu ivre ? Va cuver ton vin ![#1.14 litt. éloigne ton vin de dessus toi.]

15Anne répondit : Mon seigneur, je ne suis pas une femme entêtée, et je n'ai bu ni vin ni boisson alcoolisée ; je me répandais devant le Seigneur .[#1.15 litt. dure , c.-à-d. avec qui on ne peut pas discuter ; l'expression hébraïque correspondante a souvent été comprise comme signifiant affligée, ou désespérée . On pourrait aussi traduire non (je ne suis pas ivre), mon seigneur ; je suis une femme obstinée, mais je n'ai bu ni vin… – cf. Lv 10.9 ; Nb 6.3 ; Jg 13.4 ; Pr 20.1 etc. – autres traductions je répandais mon âme (cf. Gn 1.20) ; je m'épanchais ; cf. Ps 62.9.]

16Ne me prends pas, moi, ta servante, pour une femme sans morale, car c'est l'excès de ma douleur et de ma contrariété qui m'a fait parler jusqu'ici.[#1.16 litt. fille de Bélial, cf. 2.12 ; Dt 13.14. – cf. Ps 50.15 ; 120.1.]

17Eli répondit : Va en paix ; que le Dieu d'Israël te donne ce que tu lui as demandé ![#1.17 Cf. Ph 4.6s. – Voir – ce verbe, qui réapparaît aux v. 20,27,28, est le fil conducteur de la fin du chap. ; voir aussi 2.20.]

18Elle dit : Je suis ta servante ; que je trouve toujours grâce à tes yeux ! Puis elle repartit. Elle mangea, et son visage ne fut plus le même.[#1.18 cf. Gn 33.15 ; le texte joue peut-être sur le mot hébreu hén = qui est apparenté au nom d’ Anne (v. 2). – litt. et la femme alla sur son chemin . – litt. son visage (celui qu'elle avait présenté jusqu'alors) ne fut plus à elle.]

19Ils se levèrent de bon matin et, après s'être prosternés devant le Seigneur , ils rentrèrent chez eux, à Rama.[#1.19 litt. connut, cf. Gn 4.1.]

Naissance et enfance de Samuel

Elqana eut des relations avec sa femme Anne, et le Seigneur se souvint d'elle.

20A la fin de l'année, elle était enceinte ; elle mit au monde un fils, qu'elle appela du nom de Samuel – car, dit-elle, c'est au Seigneur que je l'ai demandé.[#1.20 autre traduction dans le cours de l'année, elle fut enceinte et mit au monde… ; cf. Gn 25.21 ; 30.22s ; l'expression traduite par la fin de l'année pourrait désigner l'époque de la fête de la Récolte, à l'automne (cf. Ex 34.22+ ; voir ). – hébreu Shemou'el ; ce fait assonance avec le verbe demander, hébreu sha'al, cf. v. 11 ; voir Jr 15.1 ; Ps 99.6. – sous-entendu dans le texte.]

21Le mari, Elqana, monta ensuite, avec toute sa famille, pour offrir au Seigneur le sacrifice annuel, ainsi que son vœu.[#1.21 autre traduction l'homme . – litt. sa maison ou sa maisonnée . – litt. le sacrifice des jours (v. 3) ; de même en 2.19 ; 20.6 ; 27.7. – c.-à-d. son offrande votive ; cf. Ps 116.14 ; Ec 5.3s. On ignore s'il s'agit d'un vœu particulier prononcé par Elqana, ou de la confirmation du vœu d'Anne (cf. Nb 30.14).]

22Mais Anne ne monta pas. Car elle avait dit à son mari : Lorsque le garçon sera sevré, je l'amènerai, afin qu'il paraisse devant le Seigneur et qu'il reste là pour toujours.[#1.22 l'allaitement d'un enfant durait généralement jusqu'à un an, parfois même jusqu'à trois ans (cf. 2 7.27 : « Mon fils, aie pitié de moi qui t'ai porté dans mon sein neuf mois, qui t'ai allaité trois ans, qui t'ai nourri et élevé jusqu'à l'âge où tu es »). – un ms de porte je le donnerai comme nazir pour toujours, tous les jours de sa vie . Cf. v. 11. – c.-à-d. qu'il se présente au sanctuaire ; cf. Ex 23.15,17 ; Dt 16.16 ; 31.11 ; Es 1.12.]

23Elqana, son mari, lui dit : Fais comme il te plaira ; reste ici jusqu'à ce que tu l'aies sevré. Que le Seigneur réalise seulement sa parole ! Ainsi la femme resta ; elle allaita son fils, jusqu'à ce qu'elle l'eût sevré.[#1.23 (ou confirme ) (ou sa promesse ) : cette affirmation ne semble pas se rapporter à une promesse particulière et explicite de Dieu, mais à son dessein bienveillant et protecteur envers Samuel et sa famille, invoqué par Eli au v. 17. réalise ta parole, c.-à-d. fasse en sorte que ta promesse se réalise . On retrouve cette expression en Dt 9.5 ; 2S 7.25 ; 1R 2.4 ; 6.12 ; 8.20 ; 12.15.]

24Quand elle l'eut sevré, elle le fit monter avec elle et prit trois taureaux, un épha de farine et une outre de vin. Elle l'amena à la maison du Seigneur , à Silo : le garçon était encore tout jeune.[#1.24 Cf. Lc 2.41. – ou, selon LXX et , et avec l'appui partiel d'un ms de Qumrân, un taureau de trois ans, ce qui s'accorderait mieux avec la mention du v. 25 ( le taureau ). – le sacrifice d'un animal s'accompagnait souvent d'une offrande végétale ( ) et d'une libation ( ) ; cf. Ex 29.40s ; Lv 23.18 ; Nb 15.8ss etc. Une partie du vin emporté pouvait aussi être consommée lors du repas de fête ; cf. v. 4s. – le mot remplace ici le terme plus spécifique utilisé au v. 9 ( ). Anne accomplit ainsi son vœu (v. 11). – litt. le garçon était un garçon ; on pourrait aussi comprendre le garçon devint un serviteur (d'Eli, ou du sanctuaire) ; cf. 2.11, où un autre terme, traduit par officier, pourrait aussi être rendu par servir . LXX porte ici un texte plus long : et le garçon était avec eux ; (25) ils l'amenèrent (ou s'avancèrent ) devant le Seigneur ; son père immola le sacrifice qu'il faisait chaque année (litt. de jours en jours, cf. 1.3) pour le Seigneur ; il amena l'enfant (ou l'enfant s'avança ) , il immola le taureau et il amena Anne, la mère de l'enfant (ou Anne… s'avança, ou encore Anne… l'amena ) à Eli.]

25Ils immolèrent le taureau et amenèrent le garçon à Eli.[#1.25 résumé du rituel sacrificiel.]

26Anne dit : Pardon, mon seigneur ! Par ta vie, je suis cette femme qui se tenait ici, avec toi, pour prier le Seigneur .[#1.26 litt. par moi ; cf. Gn 43.20 ; 1R 3.17. – formule de serment, attestant la véracité d'une affirmation.]

27C'était pour ce garçon que je priais, et le Seigneur m'a donné ce que je lui demandais.[#1.27 Cf. Jb 22.27.]

28A mon tour, je le cède à la demande du Seigneur : il sera demandé pour le Seigneur tous les jours de sa vie. Sur quoi ils se prosternèrent, là, devant le Seigneur .[#1.28 la forme verbale correspondante est dérivée de celle qui est traduite précédemment par demander ; une autre forme est rendue ici par cf. v. 17,20. – ou requis, en hébreu sha'oul, qui se trouve être également le nom propre de Saül ; c'est à Samuel, que le peuple demandera un roi, qui sera Saül, cf. 8.10. – litt. tous les jours qu'il sera . – d'après Syr et ; le texte hébreu traditionnel porte il (Samuel ? Elqana ? Eli ?) se prosterna ; un ms de Qumrân lit elle (Anne) se prosterna.]

Nouvelle Bible Segond © Société biblique française-Bibli'O, 2002 Première édition de la Bible d’étude : sous la direction de Henri Blocher, Jean-Claude Dubs†, Mario Echtler†, Jean-Claude Verrecchia, coordination Didier Fougeras.
Published by: French Bible Society